Le droit de vivre n'implique-t-il pas l'accès inconditionnel à tout ce qui est vital ?
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LE REVENU INCONDITIONNEL D'EXISTENCE
Le débat se déroule en présence de deux membres du MFRB (Mouvement Français pour le Revenu de Base) qui travaille depuis plusieurs d'années afin de promouvoir l'idée d'un revenu inconditionnel d'existence..
Pour cela, ce mouvement organise des conférences, des débats, des réunions publiques, écrit des articles, répond à des interviews, ...
Voir leur site : http://www.revenudebase.info/
Les résultats commencent à être visibles : le revenu de base a même été une promesse de campagne d'un candidat aux primaires de "la belle alliance populaire" désigné vainqueur en grande partie grâce à cette promesse ; la classe politique s'est donc emparée de cette idée, le grand public en a alors entendu parler comme étant un concept envisageable et, pour le MFBR, c'est une grande avancée.
Un des participants se dit interloqué de voir cette idée reprise par divers courants politiques, même opposés - cela lui semble paradoxal.
Oui, tout dépend de la définition que l'on donne à un revenu d'existence ; pour les uns, il faut qu'il soit véritablement émancipateur (c'est à dire libérer les individus de la précarité, de la pauvreté), pour les autres, c'est seulement un gage de paix sociale et une simplification des démarches administratives d'attribution d'allocations (l'émancipation n'est pas le but recherché).
Dans le premier cas, son montant devra être au moins égal au seuil de pauvreté (soit, en France, 980 euros mensuel), dans le second, il pourrait être égal à l'actuel RSA ou un petit peu plus.
Le premier avantage d'un revenu d'existence, sa plus grande force (avant même son montant qui a, certes, une importance), c'est son inconditionnalité, c'est être assuré de le percevoir chaque mois, en toute certitude. C'est cela qui change tout.
Alors, reprend ce participant, cela ne pourrait-il pas provoquer de l'inflation ? Ne risque-t-on pas de voir augmenter les loyers, les prix des denrées alimentaires et des produits de première nécessité ?
Les membres du MFRB ne pensent pas que ce soit inéluctable et, si cela provoque de l'inflation, elle sera limitée. Les propriétaires profitent déjà des Allocations Logements pour augmenter le prix des loyers, le Revenu de Base ne pourra guère les faire augmenter encore plus. Quant aux autres produits, il y a deux solutions : soit le législateur fait encadrer les prix de ce genre de produits (cela s'est déjà fait), soit les salaires (et le Revenu de Base) sont indexés sur l'inflation (comme c'était le cas, dans le passé).
Par ailleurs, l'inflation a un avantage : elle rend les dettes plus faciles à rembourser, ce n'est pas négligeable.
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Mais où trouver l'argent nécessaire à cette distribution généralisée ?
Là, tout est une simple question de volonté politique. L'argent, il y en a... ne serait-ce que dans les paradis fiscaux, par exemple. Et il y a bien d'autres pistes (TVA, taxes sur les transactions financières, ...) - par ailleurs, il faut bien avoir à l'esprit qu'une grande partie des allocations actuelles n'existeraient plus (allocations familiales, RSA,... pour ne citer que celles-là).
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"Pourquoi "universel" ?", demande quelqu'un, "pourquoi le verser également aux riches ?"
Il sera récupéré par l'impôt et c'est une garantie qu'aucun riche ne viendra accuser ceux qui le perçoivent d'être des "assistés", puisqu'il touchera le même montant.
Quelqu'un remarque qu'il y a parmi les petits salariés plus de personnes contre l'idée du revenu de base que chez les plus aisés - Ah ! Le fameux "il faut travailler pour vivre" que l'on inculque dans le cerveau des exploités* dès leur enfance... ça laisse des traces quasi indélébiles.
* comme on les appelait dans le passé : voir cette vidéo de 4 minutes : https://www.youtube.com/watch?v=FJzOM6jIgWI
Il arrive également que le ressenti peut être différent de la réalité : certains se sentiront pauvres alors qu'ils ne le sont pas - à l'inverse, certains qui pourraient être considérés comme faisant partie des pauvres ne le ressentent pas ainsi.
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Une des personnes présentes exprime sa préférence pour le "salaire à vie" comme le préconise Bernard Friot - salaire d'un minimum de 1 500 euros et d'un maximum de 6 000 euros perçu tout au long de sa vie d'adulte que l'on ait un emploi ou pas, que l'on soit à l'âge de la retraite ou pas. Il s'agit d'élargir la conquête du salaire minimum en assurant une sécurité sociale digne de ce nom - c'est à dire, pour résumer, optimiser les acquis sociaux mis en place par le CNR (Conseil National de la Résistance) en leur ajoutant un salaire inconditionnel.
Quelqu'un renchérit en insistant sur le fait que le salaire à vie est préférable car il s'appuie sur le principe de solidarité, alors que le Revenu de Base serait plutôt de l'ordre du caritatif.
[Récupérer les milliards planqués dans les paradis fiscaux pour les distribuer à la population : est-ce de la charité ? Ne serait-ce pas plutôt de la justice sociale ? Ou même de la justice tout court....]
Les échanges deviennent un peu vifs entre les tenants du revenu d'existence et ceux du salaire à vie.
Les seconds craignent que la mise en place du Revenu de Base ne serve de prétexte à la casse des services publics, à la fin de l'assurance maladie, à la disparition du salaire minimum, .... bref, que cela ne soit qu'une arnaque néo-libérale de plus.
Leurs interlocuteurs s'insurgent : la casse des services publics n'a pas attendu la mise en place du Revenu de base, le "trou" de l'assurance maladie qui sert d'alibi pour rogner la prise en charge de certains soins, il en est question depuis des décennies, et personne ne parle de disparition du SMIC en rapport avec le Revenu de Base !
Pourquoi ne penser qu'aux éventuels (et parfois fantasmés) effets pervers liés à la mise en place d'un revenu d'existence universel ?
Savez-vous ce qu'est la peur constante du lendemain des pauvres et des précaires ? Savez-vous ce que peut être l'humiliation de devoir se justifier quand on est devant une sorte de "jury" qui va décider si oui ou non vous "méritez" de continuer à percevoir une aide ? Ne pouvez-vous pas admettre que tout être humain a besoin d'un minimum de stabilité de revenu pour faire des projets, pour ne pas subir la pensée constante du manque d'argent lui barrant l'accès au moindre besoin ? Et il s'agit là de vrai besoin : manger, s'abriter, se chauffer quand il gèle dehors. Avez-vous idée de la vulnérabilité, de l'angoisse et des ravages que tout cela occasionne sur le mental, les capacités intellectuelles* ?
* (voir en fin d'article la vidéo qui dure environ 15 minutes)
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Constatez comme on infantilise (et donc humilie) les demandeurs d'emplois, par exemple :
CLIQUER SUR L'IMAGE POUR L'AGRANDIR
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Vous est-il impossible de laisser un peu en retrait votre volonté de voir disparaître le néo-libéralisme, de retrouver la période des trente glorieuses, des "jours heureux" en pensant qu'il est tout simplement plus urgent, plus intensément prioritaire de sortir toutes ces personnes-là de leur situation humainement intolérable.... elles ne peuvent pas attendre le "grand soir" que vous leur faites miroiter et dont l'arrivée recule encore et encore comme le fait l'horizon jamais atteignable ou comme les croyants qui attendent de leurs souffrances qu'elles leur donnent une place au paradis.
Vous comptez sur tous ces gens pour se révolter, pour vous rejoindre dans les manifestations, pour faire grève (ceux parmi eux qui ont un emploi, en ont un partiel, provisoire, sous-payé), pour grossir vos rangs ?
Vous vous trompez, alors et vous vous trompez lourdement - Ils sont exclus, ils se sentent exclus de la société dont vous faites partie.
Ils ne viendront pas vous rejoindre. Ils ont le sentiment que vous ne pouvez pas les comprendre - et ils n'ont pas tort, apparemment.
De plus, vous ne leur faites pas confiance - sourds à leur détresse, vous décidez de ce qui est bien pour eux : attendre la fin du néo-libéralisme.
Aidez plutôt à la mise en place du Revenu de Base pour qu'elle le soit de façon émancipatrice pour eux - le combat pour la fin des systèmes basés sur le profit en sera évidemment renforcé.... ensuite, place au concept de salaire à vie, si vous y tenez.
Plusieurs exemples de mise en place de Revenu de Base existent, vont exister (Finlande) ou ont existé (Dauphin au Canada - voir vidéo ci-dessous - cliquer sur le bouton "subtitles" pour la traduction) , sans qu'il y ait eu "rapport de force" pour les obtenir - les résultats en sont positifs : meilleurs résultats scolaires pour les enfants, population en meilleure santé, moins de violences, notamment familiales, ... (voir captures d'écran de la vidéo plus bas)
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